Erika n'avait rien dit du voyage. Non pas qu'elle était toujours déçue par cette histoire d'animal de compagnie, ce n'était pas son genre, juste qu'elle s'amusait à écouter chantonner Nao. Même elle n'était pas surexcitée en permanence, malgré l'impression qu'elle pouvait parfois donner. Elle avait déjà entendue la chanson qui passait, mais était incapable de mettre un nom ou un titre dessus. Les musiques américaines n'étaient vraiment pas sa tasse de thé, sa mémoire était déjà accaparée par la culture otaku après tout. Erika se dit que Nao chantait plutôt bien et qu'elles devraient faire une sortie au karaoke un de ces jours. Elle en connaissait un très sympa où elle allait de temps en temps avec Walker se défouler sur des musiques d'animés.

Le regard perdu dans le vide, Erika s'était laissé partir à l'un de ces moments de rêverie. Elle fixait le paysage qui défilait comme s'il s'agissait d'une pellicule de film sans fin. Et si ce n'était pas la voiture qui bougeait mais le reste ? Et si ce qu'elle regardait n'était qu'un décor de papier qu'une immense machine déplaçait pour leur donner la sensation d'avancer ? Grande découverte ! Après la terre qui tourne autour du soleil voici le décor qui circule autour de nous ! Vous pensiez avancer ? Quelle erreur ! Personne n'avance vraiment ! Tous regardent la vie défiler ! Et elle défile, elle défile, bien que l'on ne bouge pas ! Elle défile, elle défile, jusqu'à ce qu'elle arrive bout de la bobine...

Erika se sentait somnoler, bercée par ce décor de papier, par la sensation que la vie qu'elle apercevait par la fenêtre n'était rien de plus qu'une perception floue... Les passants qui flânaient ou s’activaient le portable à la main, les voitures qu'ils croisaient, les écrans de telle boutique qui étalaient les couleurs criardes d'une émission supposément drôle... Tout cela ne lui semblait pas appartenir à sa réalité. Tout cela n'était qu'un décor. Animé, certes, mais rien de plus. Et c'était parfait comme cela. Elle sourit légèrement devant ce spectacle vivant, la tête posée sur la vitre fraiche de la voiture.

Une fois arrivée, Erika passa un regard circulaire rapide et pas très intéressé sur les voitures de luxe qui s’alignaient. Un fois garés, elle releva la tête et sorti de la voiture en écoutant d'une oreille Nao. Elle émergeait de nouveau parmi eux, reprenant conscience de la réalité palpable qui l'entourait. Elle se sentait reposée, comme à chaque fois qu'elle laissait vagabonder son esprit de cette manière. Mais Erika restait Erika, elle n'allait pas passer le reste de la journée muette à contempler dans le vide. Certainement pas !

Elle se tourna vers les deux autres après avoir très rapidement regardé le très bel immeuble qui lui faisait face. Elle avait repris un sourire malicieux.

« Tu habites seul Yû ? Ah ! Ça ne te déranges pas que je t'appelle Yû, non ? C'est plus mignon ! Mais c'est vraiment immense ici ! Tu est comme Taiga*, tu vis dans un appartement gigantesque en attendant que quelqu'un vienne te tenir compagnie ? Ah non c'est vrai tu as ton chat... À moins que vous ne soyez plusieurs à vous partager le bâtiment ? Un étage chacun comme dans Inu x boku ? »

*Toradora

Kasuka s’était bel et bien endormi, bercé par les mouvements doux de la voiture, le bruit du moteur, la voix de la femme du GPS et le riff de la guitare d’Oasis couvert par la voix mélodieuse de sa prof. L’alcool aidait certainement, mais cela faisait longtemps qu’il n’avait pas relâché sa garde comme ça. Faire assez confiance à quelqu’un qu’il vient à peine de rencontrer pour lui prêter sa voiture, laisser des émotions apparaître sur son visage, inviter des gens chez lui, s’endormir ailleurs que dans son lit… Il décompressait, mais tout cela ne lui ressemblait pas. Dire qu’il était parti pour apprendre l’anglais, pour son travail… Enfin, une petite pause ne pouvait pas vraiment lui faire de mal étant donné le rythme qu’on lui imposait et qu’il s’imposait lui-même depuis plusieurs années sans s’accorder que de rares petits moments de repos.

La mini sieste se termina à peine vingt minutes plus tard lorsque la radio se coupa. Il était chez lui, dans sa cour, vivant et il se sentait beaucoup mieux que lorsqu’il avait quitté l’appartement de Nao. Il lui répondit par un sourire, un sourire qui ne se voyait plus autant que chez elle, mais qui était tout de même là. Il sortit de la voiture et attendit ses deux compères de la journée.

« Merci beaucoup de m’avoir ramené… »

Il lui reprit ses clefs, ferma la voiture avant de se retourner vers Erika qui contemplait son immeuble en le comparant avec des animes dont il connaissait le nom mais qu’il n’avait pas regardé… Faudrait qu’un jour il pense à allumer sa télé, mais bon, en ce moment il n’avait pas trop le temps.

« Tu peux m’appeler Yû si ça te fait plaisir. Tout l’immeuble est à moi, oui... Et je vis seul avec Yuiga dedans… A vrai dire, c’est très rare que j’invite des gens ici… Alors je compte sur votre discrétion, sinon je serais surement obligé de déménager. »

Il fit le code pour déverrouiller la porte d’entrée, puis leur ouvrit et leur tint la porte en bon petit gentleman. L’intérieur de l’immeuble avait clairement été fait pour le rendre le plus accueillant et chaleureux possible. Dans le vestibule, deux énormes miroirs reflétaient les silhouettes et faisaient scintiller les lumières qui venaient de s’allumer sous le détecteur de mouvements. Yuuhei leur ouvrit la voie, appelant l’ascenseur… Quelques secondes plus tard, ils étaient dans son appartement. Lorsqu’il ouvrit la porte, qui celle-ci n’était pas verrouillée même si elle avait une serrure, la boule de poil au nom impossible vint tout de suite les accueillir, se frottant à leurs jambes, à tous les trois. Lorsqu’il eut fini son petit accueil, il fut arraché au sol par son maître qui continua de le caresser doucement.

« Bienvenue chez moi. Mettez-vous à l’aise je vous en prie. »

Il leur désigna les canapés en cuir qui avaient l’air terriblement confortables dans un coin de la pièce, puis il disparu dans la cuisine pour voir ce qu’il pourrait bien leur offrir à boire… Il n’avait pas d’alcool lui, à part une bouteille de très bon saké qu’on lui avait donné à sa dernière émission de télé. Les filles pouvaient la boire, surement… Pour lui, hm… Du jus de fruit bien frais. Il aurait bien prit du lait, mais avec l’alcool qu’il venait d’avaler, il avait un peu peur du résultat. Il fut bien obligé de lâcher Yuiga pour apporter la bouteille et les verres à saké pour les deux filles, puis repartit pour se chercher son jus de fruit.

« Je suis désolé, je n’ai que ça à vous proposez comme boisson alcoolisée… j’espère que vous aimez… »

Yuiga le suivait partout, puis monta sur l’un des canapés pour venir embêter les filles, jouant avec leurs vêtements, lorsque son maître était enfin posé.

« Yuiga, allons soit gentil avec nos invitées…Vous pouvez le pousser s’il est trop encombrant… »

La discrétion n'était pas le point fort d'une surexcitée telle qu'Érika, mais elle se promit de garder le secret avec autant de volonté que celle de Kyousuke. Elle trépignait de joie de devoir garder un secret et imaginait déjà faire des sous-entendus à Walker, avant de se dire que c'était peut-être déjà mettre à mal la confiance que lui avait accordée Kasuka...

En tout cas, Erika était vraiment impressionnée. Kasuka vivait vraiment seul dans un tel bâtiment ! Elle ne pu s'empêcher de trouver ça plutôt triste quelque part... Une si grande demeure vide, à quoi ça pouvait bien servir ? Elle qui avait l'habitude de passer le plus clair de son temps avec ses trois comparses dans un van, elle n'arrivait pas à imaginer la vie que pouvait mener un jeune homme vivant juste avec son chat dans un endroit aussi vaste. Est-ce que toutes les pièces servaient vraiment à quelque chose ? Elle ne pouvait s'empêcher de se dire qu'il ne devait mettre les pieds que rarement dans certaines d'entre-elles.

En entrant, Erika fût surprise par le style accueillant de l'immeuble, qu'elle imaginait plus austère, ou plutôt plus neutre, à l'image de son propriétaire. Il ne se dégageait pas cette impression de solitude qu'elle imaginait que Kasuka pouvait ressentir. Elle tiqua lorsqu'elle vit celui-ci appuyer sur un bouton.

« Ah ! Un ascenseur ! Chez toi ? Yû, t'as trop la classe ! »

Une fois le chat retrouvé, Erika lui jeta un bref regard. Il ne l'intéressait pas tellement, mais il fallait bien admettre que Kasuka était très attentionné avec lui. Lorsqu'il leur proposa de se mettre à l'aise, Erika n'hésita pas et alla se ficher sur l'un des canapés presque immédiatement. Elle lâcha un petit sourire en attendant Yuhei parler d'alcool directement. Elle se dit qu'il devait les prendre pour des pochetronnes, ce qui n'était pas vrai, du moins dans le cas d'Erika. Même s'il lui arrivait de boire, ça restait occasionnel et elle ne faisait pas en sorte de finir complètement bourrée. Ceci dit, elle n'avait rien contre le sake, alors elle accepta.

Erika écouta la déferlante de questions de Nao. Elle aussi se demandait si les deux frères se voyaient souvent, ce qui n'était peut-être plus le cas depuis qu'ils vivaient tous les deux seuls. Ou plutôt, elle se demandait quel genre de relation entretenaient-ils au juste ? Mais elle ne préférait pas poser ce genre de question, elle sonnait vraiment trop bizarrement et cela effrayerait probablement le jeune acteur. Comme l'avait deviner Nao, Erika ne pouvait s'empêcher d'imaginer de l'inceste entre les deux. Le yaoi incestueux était un genre qu'elle appréciait beaucoup et s'il y avait du shôta en plus c'était encore mieux ! C'était ce genre de préférences qui l'avait poussé à regarder plusieurs fois des animes du style Papa to kiss in the dark alors même qu'elle trouvait le scénario inintéressant. Elle sourit intérieurement en imaginant la réaction qu'aurait eu Walker en la voyant fantasmer sur ce genre de choses.

« Diiis, Yû-chan ! Ça fait longtemps que tu vis seul ? Tu n'as pas de petite-amie avec qui tu pourrais vivre ? »

Après tout, Erika n'était pas dupe. Un si beau garçon, riche, jeune et célèbre, devait avoir un gros succès auprès des femmes. Il sortait peut-être déjà avec l'une d'entre-elles.

Ou l'un d'entre eux...

Elle se dit qu'elle devait vraiment être obsédée par le yaoi pour vouloir à ce point en voir partout, même quand il n'y avait absolument aucune raison d'en imaginer.

Il était loin d’imaginer les pensées perverses que ses deux invitées pouvaient avoir. Lui et son frère ? Il aurait à peine sourcillé si on lui avait dit quelque chose dans ce goût là, mais il n’aurait certainement pas compris pourquoi elles pensaient ça. Entre lui et son frère, il y avait beaucoup d’affection fraternelle, mais elle était la plupart du temps très contenue. Même un simple câlin, c’était beaucoup, et même s’il en avait vraiment envie, il avait du mal à oser un geste aussi tendre. Il avait une distance polie envers son frère, craignant sans doute d’être repoussé. Oh oui, s’il se faisait repousser par Shizuo, ce serait terrible pour lui. Bien plus terrible que de se prendre un coup de réfrigérateur sur le coin du nez. Curieux ça, mais il préfèrerait mille fois que son frère le blesse sous la colère plutôt qu’il le repousse froidement. Mais bon, ça aussi, il ferait en sorte que cela n’arrive pas, il ne voulait pas être coupable du mal-être de Shizuo d’une façon ou d’une autre.

« J’ai beaucoup aimé votre cours, Sensei, j’ai hâte d’avoir celui sur la mythologie. »

L’autre partie des questions était beaucoup plus dure à satisfaire. Il prit une grande gorgée de jus d’orange, posa son verre et tapota le cuir à côté de lui, signifiant à Yuiga qu’il avait envie qu’il vienne près de lui. Le chaton ne se fit pas prier pour le rejoindre sur le canapé, grimpant même sur ses genoux pour se rouler en boule sur lui. C’est vrai qu’il lui arrivait très souvent de se sentir seul et c’était bien pour ça qu’il avait prit Yuiga avec lui. Parce que non, il n’avait pas de petite amie, non son frère ne lui rendait pas visite et en plus de ça, il n’avait pas d’amis. Il ne pouvait pas blâmer tout sur son frère ou sur sa carrière d’ailleurs, il savait bien qu’il était responsable de sa solitude, parce que lui-même n’accordait pas assez de temps à ses relations, et quand il était avec eux, son manque d’expressions et de paroles faisait de lui une piètre compagnie. Il caressa doucement son chaton.

« Je vais vous décevoir mais il ne vient jamais ici. Je pense qu’il a peur de me déranger… En général c’est plutôt moi qui vais chez lui. »

Il avait la tête qui tournait un peu, c’était pire qu’une interview, il n’avait jamais eu à exprimer son sentiment de solitude à personne et ne savait pas si c’était une bonne ou une mauvaise chose qu’on le pousse à en parler, en tout cas, c’était vraiment difficile pour lui et ses réponses mettaient quelque temps à franchir ses lèvres, ses doigts caressant toujours le chaton, comme pour se donner une contenance.

« Je vis seul depuis deux ans et non je n’ai pas de petite amie, je ferais sans doute un piètre compagnon. Je n’ai pas vraiment d’amis non plus, et je me sens seul, c’est vrai. Heureusement que Yuigadokusonmaru est avec moi. »

Voilà, il avait tout dit en quelques mots mais ça lui semblait totalement dérisoire à côté de ce qu’il ressentait vraiment. Mais c’était dur à faire sortir, et en plus, il n’avait pas envie de paraître trop pitoyable. Mais au moins, il avait répondu. Et il avait peur d’avoir jeté un froid. Pour les relancer… Mmh Il pourrait regarder qui était donc ce Tôno auxquels Erika le comparait. Il alluma la Télé et la playstation 3, lançant le web browser en écrivant le nom du personnage dans la barre de recherche google image.

C’était bien un yaoi. Enfin il s’en était douté vu qu’elle parlait de seme et de uke mais bon.

« Tôno c’est donc le brun ? »

Erika était étonnée que Shizuo ne vienne jamais voir son petit-frère chez lui, elle l'imaginait plutôt porté sur la famille pourtant. Après tout, il avait beau effrayer la majeure partie d'Ikebukuro, c'était quelqu'un de sociable appréciant les relations humaines. Et probablement du genre à tenir beaucoup à son petit-frère selon Erika. Peur de déranger ? Le pire c'est que ça pouvait bien être le cas, ce qui agaçait un peu Erika. Alors qu'il semblait manquer à son frère, il n'irait pas le voir pour une raison aussi futile ? Bien sûr, ce n'était qu'un point de vu, mais allez donc expliquer à Erika que l'on pouvait être embarrassé face à un jeune frère prodige, ayant mieux réussi que vous niveau carrière et très occupé. Ou ce genre de choses... Il fallait bien admettre qu'elle avait toujours été beaucoup trop rentre-dedans pour comprendre ce type de sentiment.

Elle fût également surprise quand Kasuka expliqua qu'il n'avait ni petite-amie, ni même amis et qu'il se sentait seul. Pourtant, c'était quelqu'un de populaire qui devait côtoyer pas mal de monde au quotidien. Mais c'était probablement ça le problème. Comment pouvait-il savoir qui l'appréciait pour ce qu'il était vraiment et non pour les rôles qu'il pouvait jouer, son apparence, sa célébrité ou son argent ? Il semblait avoir tout pour lui, mais toutes ses qualités n'étouffaient pas encore plus sa personnalité ? Être très entouré c'est une chose, mais réussir à s'attacher véritablement à quelqu'un et réussir à ce que cette personne cherche à vous connaitre vraiment et accepte ce qu'elle y trouve, c'était une autre histoire. Et malheureusement, le visage impassible de Kasuka n'aidait pas vraiment, obligeant son entourage à creuser pour essayer d’apercevoir ses sentiments. Inutile de préciser qu'à une époque où il est possible de côtoyer tellement de monde, très peu font l'effort de vraiment chercher, trouvant plus simple d'éviter ceux qui ne donne pas l'impression d'être très sociable d'un premier abord. Erika comprenait bien tout ça et se dit qu'au final, la personnalité de Kasuka n'était peut-être pas si difficile à cerner qu'elle pouvait en avoir l'air. Il ne cherchait pas vraiment à se cacher après tout, il n'arrivait juste pas à se montrer de lui-même.

Tandis qu'elle était plongée dans ses pensées, Yûhei était parti regarder sur internet. Elle reconnu aussitôt les images qui s'affichaient à l'écran, bien sûr, et trouvait adorable qu'il essaye à se point de comprendre ce qu'elle voulait dire, c'était assez rare. Là aussi la plupart préférait ignorer les références étranges qu'elle pouvait faire.

« Oui, Tôno-chan est bien le brun ! On ne dirait pas sur les couvertures mais il est inexpressif en réalité, sauf dans les bras de son Tamiya chéri bien sûr ! Et même si tout le monde ne le comprend pas, le principal c'est qu'ils y parviennent entre eux et qu'ils s'aiment comme ils sont ! Tu vois, tu ne ferais pas un piètre compagnon ou je ne sais pas quelle autre bêtise de ce genre ! Alors arrête un peu de te dévaloriser ! Ce n'est pas parce qu'on ne montre pas ses sentiments qu'on est insensible ! Regarde Yuiga-truc ! Est-ce qu'il ne t'aime pas comme tu es ? C'est pareil pour les gens, tu ne me feras pas croire que personne ne t'aime pour ce qu'ils voient de toi. Même s'il faut de l'entrainement pour voir derrière ce visage impassible, je suis sure que c'est possible ! Alors je t'interdis de déprimer, ou je te donne un Kousaka Kick quitte à me ridiculiser ! »

Erika jeta un coup d'oeil à Nao, qui avait l'air elle aussi étonnée par les paroles de Kasuka. Alors qu'elle commençait à parler des envies que devait pourtant bien avoir un jeune homme, un immense sourire apparu sur le visage d'Erika. Homme ou femme, hein ? On sentait bien là l'influence des nombreux yaoi lus !

« Eh eh ! Je ne pensais pas que tu serais aussi directe, Nao-chan~ ! ♥ Décidément, sous tes airs timides, tu peux être très franche ! Ne rougis pas comme ça voyons, c'est aussi ce qui te rends adorable ! »

Erika s'approcha de Yûhei, l'air surexcitée. On touchait à un sujet qui la motivait particulièrement et elle n'essayait même pas de cacher sa joie. Elle avait perdu toute espèce de sérieux qu'elle avait pu avoir juste avant.

« C'est vrai que tu as dis ne pas avoir de copine, mais est-ce que tu as un copain alors ? ♥ Tu n'as pas à te sentir gêné tu sais, tout le monde à le droit d'avoir ses préférences ! Et puis comme l'a dit Nao, c'est normal d'avoir des envies ! Et même si tu ne sors vraiment avec personne, il n'y a pas quelqu'un qui te plait ? ♥ »

Et oui, Kasuka était curieux de tout, il avait la capacité de tout apprendre et de tout retenir alors pourquoi s’en priver ? Il avait des choses qu’il préférait à d’autres, par exemple, la pêche au harpon, c’est cool la pêche au harpon, nager dans l’eau pendant des heures, suivant la proie, attendant le bon moment pour tirer. Oui c’était vraiment quelque chose qu’il aimait. Mais bon étudier aussi, alors pourquoi pas la mythologie celtique ? Il avait déjà des bonnes bases sur celle de chine et celle de la grèce antique grâce à des cours qu’il avait prit en option à l’école. La chrétienne l’intéressait aussi, les anges, les démons, tout ça. Mais maintenant qu’il avait la larme d’Yggdrassil, il voulait savoir ce qui rendait la pierre si précieuse pour la jeune Irlandaise. En plus il était sûr que c’était une histoire passionnante, et il adore aussi les histoires passionnantes.

Pareil avec le Yaoi, avec Tôno, rien d’étonnant à ce que Kasuka s’y intéresse là aussi. Il fixait l’écran, cherchant une image où le fameux Tôno avait un visage aussi fermé que le sien. C’était très intéressant comme procédé, le fait de dessiner les émotions du personnage en chibi à côté de celui-ci pour bien montrer qu’en effet, il n’était pas insensible et même carrément troublé. Il n’avait pas le souvenir d’avoir été si troublé d’ailleurs, mais il était certain que son visage ne serait pas très différent de celui de Tôno s’il était à sa place. Kasuka aurait aimé avoir quelque chose de similaire pour traduire ce que son visage ne traduisait pas, ce serait vraiment pratique pour le coup. Son regard passa de l’écran à Erika lorsque celle-ci dériva la conversation du Boys Love pour revenir à lui. Hum, zut, la diversion n’avait pas marché. Il l’écouta, attentif. Les mots d’Erika le réconfortait, elle était au moins aussi touchante que Nao, dans son genre bien à elle. Il aurait sourit, encore, s’il en avait été capable. Il regarda Yuiga qui se laissait caresser sur ses genoux et se dit que oui, l’animal se fichait bien de s’il exprimait ses sentiments ou pas, il n’avait pas besoin de ça pour savoir qu’il était aimé. Quelque part, Erika avait raison, surement qu’un jour il trouverait quelqu’un qui n’aurait pas besoin qu’il s’exprime pour qu’il soit comprit. Mais bon, on en était pas là.

« Yuigadokusonmaru, mais tu peux l’appeler Yuiga tout seul, ça lui va bien aussi. Merci, merci beaucoup Erika-san. »

Il n’arrivait pas vraiment à soutenir le regard de la fujoshi, alors il se retourna vers son écran pour chercher maintenant « Kousaka Kick » dans google. Oh, Mirai Nikki. Okay, ça faisait deux fois qu’elle le citait, il devrait peut-être regarder de quoi avait l’air cet anime, un jour. Peut-être dans l’avion pour aller à Los Angeles dans quelques mois ? Alors qu’il parcourrait l’écran des yeux, les questions redevenaient de plus en plus gênantes. Il tourna son visage digne d’un joueur de poker vers Nao, puis vers Erika qui s’approchait de lui toute excitée à l’idée d’avoir un homosexuel en mal d’amour devant elle. Oulla. Comment allait-il faire ? Être honnête ? A vrai dire il n’avait pas imaginé une seule seconde qu’elles finiraient par lui demander s’il était satisfait sexuellement. C’était la première fois qu’on lui posait ce genre de questions, mais bon en même temps les deux jeunes filles n’étaient pas non plus le type de personne qu’il avait pu rencontrer jusque là. Et elles étaient un vent de fraîcheur. Mais bon, pouvait-on vraiment parler de sa vie sexuelle avec un prof ? Bon, pas grave, après tout, il les avait déjà faites entrer dans sa vie en leur ouvrant la porte de chez lui et il avait bu devant elles. Il pouvait bien les considérer comme des amies, surtout qu'elles n'avaient pas l'air de s'intéresser du tout à sa célébrité et semblaient beaucoup plus tournées vers celui qu'il était vraiment quand il enlevait le masque du jeu.

« En Europe, les professeurs ont l’habitude de s’inquiéter des envies de leurs élèves ?…Je pense que je n’ai juste pas rencontré la bonne personne… et désolé pour tes fantasmes Erika, mais je n’ai jamais fait ça « pour de vrai » avec un homme. Mais je ne suis pas contre non plus… Si jamais je trouve quelqu’un avec qui essayer. »

Il dérangea un peu son chat pour se resservir du jus de fruits, bu le verre d’une traite, puis demanda à son tour, tout à fait sérieux, et c’était légitime vu la question qu’on lui avait posé à lui.

« Et vous ? Quelle est la dominante dans votre couple ? »

Erika sourit devant les remerciements de Kasuka. Il avait beau ne pas être expressif, elle savait qu'il était sincère et ça lui faisait plaisir. Elle se dit qu'il était vraiment quelqu'un de bien et croisait les doigts pour qu'il trouve quelqu'un. Et il n'y avait aucune chance qu'il ne trouve pas, n'est-ce pas ? Avait-il seulement un seul défaut ? Son manque d'expression ? Bah, les gens étaient mal-à-l'aise si facilement ! Du moins c'est comme ça que raisonnait Erika. Et puis il s'intéressait vraiment aux gens qui l'entourait, une qualité qu'Erika trouvait bien trop rare, il suffisait de voir comment il regardait sur le net les références qu'elle faisait, pour essayer de la comprendre.

Le coeur d'Erika s'arrêta, avant de s'affoler brutalement, lors de la prise de parole de Kasuka qui suivit. Elle avait bien entendu ? Ce n'était pas encore son imagination perverse qui lui jouait des tours ? Elle jeta un oeil à Nao et se rendit compte qu'elle ne faisait pas d'erreur à l'expression qu'avait cette dernière.

Bien sûr, Kasuka ne l'avait jamais fait avec un homme, Erika s'en doutait fortement. Mais il n'était pas contre l'idée. C'était bien la première fois qu'elle rencontrait un homme qui avouait que ça ne le dérangeait pas. Elle qui ne pensait plus vraiment entendre ça un jour pour de vrai, elle était toute émoustillée. Ses films mentaux défilèrent bien sûr à toute allure. Elle remercia mentalement son amie de sa réponse. Oh ouiii ! Aucun doute qu'elles prendraient toutes deux grand plaisir à faire rencontrer des hommes au charmant jeune homme qui leur faisait face !

« Tu peux enlever le "on doit pouvoir" Nao-chan ! On trouvera c'est sûr ! Motivées comme on est ! »

Erika ria de bon coeur, elle se sentait sur un nuage. Oui, il en faut bien peu pour rendre euphorique une yaoiste !

Quand Kasuka demanda qui dominait entre Nao et elle, elle failli s'étouffer de rire. Intéressant, ce garçon était vraiment très intéressant ! Il avait l'air d'avoir ériger un mur entre lui et le reste du monde mais en réalité il savait très bien quoi dire pour piquer la curiosité de son auditoire. Nao devait s'en vouloir un peu d'être assez directe pour les moeurs du pays, Kasuka répondait aussi sec au vif et avec humour, malgré la retenue qu'il semblait faire preuve au départ. Erika l'appréciait de plus en plus.

Elle écouta Nao répondre en ne pouvant retenir un immense sourire. Décidément, les gens pouvaient être passionnants ! Elle jouait le jeu, carrément quitte à faire. Nao devait savoir qu'Erika n'était pas du genre à s'offusquer pour si peu. En plus si elle devait faire la dominante, ça lui allait d'autant plus. Erika sursauta quand Nao prononça le mot "amoureuse". Ce n'était pas directement diriger vers elle, elle le savait bien, mais elle se demanda si son amie était sérieuse ou non. Quand Nao eut fini de parler, Erika pensa que c'était peut-être moitié-moitié. Que devait-elle répondre ? Elle chassa cette question de son esprit, les choses trop sérieuses l'embarrassait, et se dit que Nao semblait avoir flashé sur Dotachin après tout. Erika tenait surtout le rôle de la bonne amie pour le moment... Elle se dit qu'elle jouerait le jeu et qu'elle verrait bien plus tard, elle avait autre chose à penser sur le coup.

« Je ne suis pas plus dominante que dominée en règle générale je pense, mais avec ma petite Nao, je n'ai pas vraiment à hésiter ! ♥ »

Erika explosa de rire pour de bon avec les questions que Nao posait à Kasuka. Elle riait parce qu'elle était heureuse, parce qu'elle trouvait les gens avec qui elle se trouvait à ce moment absolument passionnants, parce que cette discussion était décidément palpitante. Elle mourrait d'envie d'entendre les réponses de Kasuka et le fixa en souriant. Surtout que Nao était allée très loin en mentionnant son frère et en parlant des fesses de Kasuka. Erika avait tous ses sens de fujoshi en alerte et jubilait intérieurement.

Oulla. Ce n’était pas des fausses fujoshi ça… Il regarda leur visage se métamorphoser à sa petite annonce, qu’il pensait pourtant être anodine. Il sourit intérieurement, il avait l’impression d’avoir illuminé leur journée et ça lui donnait un sentiment de satisfaction assez plaisant. En général c’était plutôt Yuuhei qui faisait cet effet là aux gens, lorsqu’il s’arrêtait pour poser avec eux ou leur signait des autographes, il avait l’habitude d’illuminer le regard des gens. Mais là aujourd’hui, ça n’avait rien à voir, ce n’était pas l’acteur mais lui, Kasuka et il n’avait même pas fait exprès, il avait juste répondu honnêtement à l’une de leur question.

Il était plutôt attiré par les filles, il avait même un type de fille qu’il trouvait particulièrement attirantes, celles plus petites et plus menues que lui. En fait le genre de fille auxquelles il pourrait passer un bras autour des épaules, protecteur. Qu’est ce que ça ferait de sortir avec un homme ? Il était plutôt petit pour le coup par rapport aux autres hommes, ce serait lui qui se retrouverait avec un bras autour des épaules ? Et lui le passerait autour de sa taille alors… ? Il imaginait le scandale : « Yuuhei Hanejima Gay ? Le jeune acteur a été aperçu mangeant une glace avec un homme dans un parc d’Ikebukuro ! ». L’article serait accompagné d’une photo volée représentant le couple déguisé mais reconnu. Ça serait… divertissant. Mais bon une déception pour certaines fans nourrissant secrètement un amour pour lui. Mais il contenterait les fujoshi du coup… Fanfic, fanart, doujinshi… Pas sûr que son agence apprécie. Mais pas sûr qu’il ne se fiche pas non plus de ce que pensait son agence ou bien la presse ou bien les fans. De toute façon, s’il tombait amoureux, ce serait assez extraordinaire alors si c’était un garçon et non pas une fille, les autres devraient faire avec.

« Avec plaisir… Mais j’espère que vous êtes patientes… »

Parce que bon, il était difficile. Et en plus, les relations avec lui ça ne marchait jamais. Et il n’était pas le genre à coucher le premier soir et pas avec n’importe qui non plus. Mais bon, les deux filles qui étaient là dans son salon semblaient avoir assez bien comprit comment il était, elles ne lui amèneraient sans doute pas des hommes qui seraient aussitôt découragés devant son visage de marbre. Il avait aussi l’option de se reposer sur un rôle qu’il avait joué, parce que des séducteurs… il en avait joués pas mal pour le coup. Mais bon, c’était pas une solution viable s’il ne pouvait pas être naturel.

La réponse de Nao ne fit que le conforter dans l’idée qu’elles étaient véritablement en couple. Un couple de filles qui fantasme sur des hommes avec d’autres hommes. Okay, c’était original. Mais ça expliquait bien pourquoi Nao avait subitement décidé de ranger son appartement en se rendant compte qu’Erika venait. C’était… trop mignon. Elles étaient trop mignonnes, individuellement, et ensemble. Bon tant pis, Nao aurait peut-être été quelqu’un de bien pour son frère, à part qu’elle buvait de la bière mais bon c’était un détail, elle semblait parfaitement heureuse avec Erika alors ce n’était pas le moment d’aller mettre la pagaille là dedans.

Il se resservit du jus de fruit mais sa main trembla lorsqu’il entendit l’insinuation de l’européenne et une bonne partie du liquide était tombée à côté du verre. Bravo Nao, Kasuka était… troublé. S’il était Tôno, il aurait sans doute eu un petit chibi tout rougissant avec les yeux confus à côté de son visage inexpressif. Wow… Il n’était pas choqué, mais bon ça lui faisait tout bizarre qu’on l’imagine dans ce genre de position avec son grand frère. Surtout comment c’était dit ? Ça faisait un peu…Kasuka à quatre pattes sur le canapé du salon, demandant d’une voix lancinante à son frère de le prendre. Il déglutit puis les regarda tour à tour, elles avaient l’air… très heureuses de cette idée. Il ne savait pas s’il devait entrer dans leur délire, sachant que de toute façon, c’était bien ça, un délire, ou bien s’offusquer…

« Pas mon frère… Je ne pourrais plus m’assoir pendant une semaine après… »

Et voilà, encore de l’humour pour s’en sortir… Insinuation grivoise sur le diamètre et la force physique de son frère, ça devrait être suffisant ? En y réfléchissant bien, ça faisait vraiment Uke comme phrase ça… Il se leva pour réparer le dégât qu’il avait fait et resta quelques secondes dans la cuisine, le temps de se remettre. Pourquoi il se sentait vulnérable tout d’un coup ? Surement qu’elle non plus n’était pas sérieuse en lui laissant entendre ça. Il soupira fortement pour évacuer le trop plein et se calmer, prenant une éponge. Il aimait beaucoup son frère, en fait, bien plus que les petites amies qu’il avait eut. Mais s’imaginer dans une position érotique avec lui ? En fait il avait du mal à voir son frère dans une position érotique avec qui que ce soit… c’est comme ses parents quoi. Etant donné qu’il ne posait pas de questions et se contentait d’observer, il était incapable de savoir si son frère avait ne serait-ce qu’eu des relations sexuelles, en tout cas, il n’avait jamais ramené de partenaire à la maison. Pour lui son frère était certainement encore vierge. Surement que son frère pensait ça de lui aussi d’ailleurs… Il revint avec son éponge et nettoya la table.

« Désolé pour ma maladresse… C’est juste, vous avez le chic pour poser des questions embarrassantes toutes les deux... En fait, je pense que ça dépendrait vraiment de ce qu’attend mon partenaire, s’il est satisfait, je le serais aussi… Mais bon ce n’est qu’hypothétique, je ne peux pas vraiment dire sans avoir essayé pas vrai ? »

Erika vu bien combien Kasuka était surpris par la remarque de Nao sur son frère. Qui ne s'en serait pas rendu compte alors qu'un jeune homme aussi parfait ratait son verre en se servant ? Elle était un peu désolée pour lui quelque part et en même temps cette réaction l'amusait. Elle n'en revient pas quand elle entendit la réponse de Kasuka. Décidément, il avait le sens de la répartie !

« Shizu-Shizu ? Violent pendant l'acte ? Hum... Possible. Ce n'est pas plus mal ! Un seme violent comme Asami ! Ah... Non, impossible d'imaginer Shizu-chan comme ce sadique pervers d'Asami... Il me fait bien plus penser à l'uke rebelle Akihito en fait... ah ! Shiz.uke ça le fait aussi ! Avec un Iza-Iza qui le drogue et... Ah non attends ! Mince je devais partir sur du Heiwajimacest !!! Raaahhh mais le shizaya est donc si présent dans mon esprit que je n'arrive même plus à imaginer un autre couple ? J'adore les relations incestueuses pourtant ! »

Erika s'énervait toute seule, trépignant sur place et criant à toute vitesse comme une hystérique en se grattant violemment la tête de ces deux mains. Elle s'arrêta s'un seul coup.

« Bah... ça doit vouloir dire qu'ils sont fait pour être ensemble ! »

La logique d'Erika était particulière, mais au moins elle n'allait pas passer la soirée à harceler Kasuka sur sa relation avec son frère, interprétant à sa sauce chaque réponse. Elle avait laissé tombé d'un seul coup, de toute façon elle savait parfaitement que Kasuka plaisantait et qu'il avait été plutôt choqué par l'idée de faire ce genre de chose avec son frère. Elle avait beau avoir l'habitude de mettre les pieds dans le plat, elle savait parfois faire preuve d'un minimum de réserve (parfois...). À quoi bon insister si c'était pour mettre Kasuka encore plus mal à l'aise ? Nao elle-même avait un peu dévié en commençant à s'imaginer dans les bras de Shizuo, ce qui amusait beaucoup Erika. Décidément, elle pouvait très vite perdre toute sa timidité lorsqu'on grattait un peu. Erika en venait à se demander si Nao n'était pas un peu volage, ce qui ne l'étonnerait pas le moins du monde d'ailleurs. Mais elle pensait sincèrement que son amie pouvait être très fidèle en amour une fois fixée sur une seule personne. Elle se rendit compte qu'elles n'avaient vraiment jamais parlé sérieusement de ce genre de choses après tout. Elle revint dans la réalité quand Kasuka s'excusa pour sa maladresse.

« T'as pas à t'excuser Yû~ ! On te maltraite un peu, pas vrai? Désolée pour ça, mais c'est vraiment trop tentant ! N'hésite pas à te venger quand tu en trouve l'occasion, tu sais trouver de bonnes répliques ! Sinon, je pense aussi qu'il faut tester pour savoir. Tant que tu n'es pas fermer à ce genre d'expériences, ça ne fera pas de mal. Enfin, façon de parler bien sûr ! »

Elle lui fit un sourire chargé en sous-entendus. Nao enchaîna en demandant à Kasuka si elles pouvaient lui trouver quelqu'un pour lui, avant de se tourner vers Erika.

« Quelle question Nao ! Évidement qu'on va le faire ! Tu me connais ! Enfin si Yû veut bien évidemment ! »

Comme Nao, Erika était très excitée à l'idée de faire une sorte de casting pour trouver un homme à Kasuka. Puis elle commença à se demander si elles n'allaient pas trop loin. Elles embarquaient Kasuka dans leurs délires yaoistes sans qu'il n'ait vraiment le temps de reprendre pied. C'était surement la première fois qu'il parlait de ça à quelqu'un et elles le brusquaient. Quoique... il en avait peut-être déjà parler à son chat ? Erika se dit que ça ne l'étonnerait même pas tant que ça, mais elle failli exploser de rire en imaginant la scène (« Dis, Yuiga, tu crois que ça fait comment de le faire avec un homme ? T'as déjà essayé toi ? »). Elle dû se mordre la lèvre pour garder un minimum de sérieux. À rire pour un rien, elle allait finir par vraiment faire peur à Kasuka...

Après lui, maintenant c’était son frère qui passait dans l’imagination perverse des deux jeunes filles. Pas de la même façon, curieusement. Nao fantasmait sur elle et lui, Erika sur lui et…Orihara Izaya ? Il était presque sur que si Shizuo ça donnait Shizu-Shizu, Iza-Iza devait être Izaya. Shizaya. Heiwajimacest. Elle leur affublait même des noms de pairing, comme les fans pouvaient faire avec certains rôles qu’il avait joués, sur internet.

Et Asami et Akihito…c’était pas Viewfinder ça ? Comment Yuuhei connaissait Viewfinder ? Pour faire bref, les artworks d’Ayane Yamano sont tellement vendeurs qu’une boite de production avait racheté les droits pour en faire un Drama TV et forcément on avait contacté Yuuhei pour lui proposer un rôle. Feilong ou Mizuno, à son choix. Pas besoin d’auditionner, on savait d’avance que le rôle lui irait à la perfection, aussi différents soient-ils. Donc il avait commencé à lire, mais il n’avait pas encore fait son choix : le leader sexy de la mafia chinoise ou un étudiant kawaii un peu paumé, fils de politicien ? Les deux étaient gays, les deux avaient des scènes de sexe. Mais ce qui était sûr c’est que... Son frère ne ressemblait pas du tout à Asami, mais pas non plus à Akihito. Il était quelque part au milieu de ses deux extrêmes.

« …Mon frère ne contrôle pas vraiment sa force, surtout quand il s’agit d’Izaya-san… »

Nao semblait bien loin, perdue dans des pensées certainement pas catholiques vu la rougeur de ses joues, encore plus colorées qu’habituellement. Ça nuançait un peu l’image qu’il avait d’elle. Elle était donc volage ? Ou alors c’était un délire aussi… ? Il interrogea Erika du regard, remarqua qu’elle n’était pas du tout offusquée, ne le fut pas non plus. Un couple libre, okay, c’était bien. Mais bon son frère ne partagerait sans doute pas ? Pas sûr là non plus, mais bon, il n’aurait jamais testé pour le savoir, sachant quelles réactions il pouvait avoir.

« Vous me maltraitez beaucoup, je n’ai pas l’habitude de parler déjà en général, mais vos sujets de conversations sont particulièrement déstabilisants… Mais je vous aime bien quand même. Et oui, je veux bien, pourquoi pas… Quel type… hmm… Quelqu’un qui aime parler tout seul ou alors qui n’a pas peur du silence, qui saura supporter les médias ou alors qui sera très discret… et qui soit majeur… Je ne veux pas de problème avec la police.»

Il retenta de se servir, réussi son entreprise et partit ranger l’éponge. Il regarda dans son frigo, c’était bientôt l’heure de manger, et il avait faim, mais qu’est ce qu’il pouvait bien leur cuisiner ? Il n’avait pas grand-chose… Comme il n’avait jamais vraiment d’invités, son frigo contenait de la nourriture pour une personne seulement. Ils allaient devoir commander. Il fouilla quelques minutes dans un tiroir et en sortit un bon paquet de prospectus puis les amena aux deux filles.

« Qu’est ce que vous voulez manger ? »

Erika sourit à l'évocation de la perte de contrôle de Shizuo face à Izaya. Oh oui, elle avait bien remarqué ! Tout ce que voyait Erika, c'était qu'Izaya ne laissait pas Shizuo indifférent. Et cette perte de contrôle était assimilée à quelque chose de bien précis dans l'esprit d'Erika, quelque chose dont on aurait bien du mal à lui faire démordre. Après tout, une haine aussi démonstrative ne cachait-elle pas quelque chose ?

La conversation revint à l'homme qu'elles pouvaient chercher pour Kasuka. Nao était déjà partie dans un flot de question, visiblement surexcitée. Erika trouvait adorable que Kasuka n'ait aucune demande particulière concernant le physique et que ces attentes concernant le moral soit si... particulières. « Quelqu’un qui aime parler tout seul » ? Erika ne pensait pas entendre ce genre de demande un jour. Surtout qu'elle voyait un Kasuka plus bavard que jamais et n'imaginait pas à quel point il pouvait être silencieux habituellement. Et puis, Erika n'aurait jamais imaginé que Kasuka accepte si facilement qu'elles lui présente quelqu'un. Prenait-il cela pour une blague ? Ou alors était-il réellement curieux et très ouvert d'esprit ? Erika se dit qu'il était de toute façon très ouvert d'esprit vu la conversation qu'ils avaient eu jusque là.

« Hum... Majeur hein ? Majorité sexuelle ou civile ? »

Elle fit mine de prendre des notes, ce qui était bien sûr inutile. Ce genre de chose qui l'intéressait particulièrement s'imprimait sans problème dans son cerveau. Elle trouvait juste le tableau plus amusant comme ça. Elle se demanda vaguement si ça pouvait paraître bizarre aux autres de s'imaginer ce qui se passait d'un point de vue extérieur, puis balaya la question tout aussi vite.

Lorsque Nao mentionna la taille que pouvait avoir les africains, Erika explosa de rire. C'était tellement stéréotypé, tellement réducteur aussi de comparer un continent à une taille de ce niveau-là, qu'Erika trouvait ça hilarant d'entendre ce genre de chose sortir de la bouche d'une gentille jeune femme aux abords innocents, qui rougissait juste après de surcroit. Quand elle s'aperçue du regard suppliant de Nao, son rire redoubla, mais elle essaya de l'étouffer.

Désolée Nao, mais te voir t'enfoncer toute seule est tellement drôle. Enfin, ce n'est pas toi qui doit enfoncer pour le coup...

Mais Kasuka ne semblait heureusement pas du genre à tomber des nues pour ce genre de sous-entendus graveleux et il fallait avouer qu'il avait déjà dû s'habituer au tempérament particulier des filles. Du moins c'était ce que se disait Erika. Et il revint effectivement avec des prospectus, demandant si elles avaient faim, sans avoir l'air choqué.

« Maintenant que tu en parles, c'est vrai que je meurs de faim ! Tu as trop fait fonctionner mon imagination, j'ai dû bruler pas mal de calories. »

Devait-elle vraiment faire allusion au fait qu'elle s'imaginait Kasuka faire des choses qu'il n'avait peut-être jamais imaginé faire avec un homme ? Bien-sûr, elle n'avait pas donner de détails, mais ça pouvait peut-être le gêner d'entendre déjà ça. Mais elle ne s'en faisait pas trop.

Erika commença à parcourir les prospectus du regard, ne sachant pas trop quoi choisir. Mais elle n'eut pas le loisir d'hésiter bien longtemps, Nao était déjà en train de montrer un plat du doigt en criant qu'elle voulait... quoi ? C'était quoi cette recette étrange ? Des pâtes aux... asperges ? Bah, Erika n'avait rien contre les nouvelles expériences et elle n'hésita pas bien longtemps cette fois-ci.

« Je vais prendre pareil que toi, Nao. Ça a l'air bizarre mais après tout ça doit bien nous aller je suppose. Et toi Yû ? Ça te dis de la cuisine italienne ? Tu veux quelque chose en particulier ? »

Exact, c’était bien la première fois qu’il se livrait autant à quelqu’un. Avec son frère, il n’avait pas besoin de parler, Shizuo le comprenait sans qu’il n’ait besoin d’ouvrir la bouche, et de toute façon, c’était plutôt Shizuo qui avait besoin de se confier en temps normal. Kasuka l’écoutait et ce rôle lui convenait parfaitement. Mais bon, les deux jeunes filles faisaient preuve d’une curiosité à son égard qu’il trouvait suffisamment flatteuse pour y répondre, justement parce qu’elles ne s’intéressaient pas à l’acteur –ça il avait l’habitude- mais à la personne –et là pour le coup, c’était la première fois-.

C’est vrai qu’il y a une sacrée différence d’âge entre la majorité sexuelle et la majorité civile au japon. 13 ans d’un côté, 21 de l’autre. Ça laissait un grand panel… Mais bon, Kasuka ne se voyait vraiment pas avec quelqu’un de cet âge là… c’était si jeune 13 ans. Qu’est ce qu’il faisait à 13 ans ? Rien encore, son frère était avec lui au collège, alors il était encore collé à lui, il n’avait pas vraiment eut de contact avec le sexe opposé, bien que déjà à l’époque, il déclenchait des rougissements et des petits rires incontrôlés lorsqu’il passait. Ce n’était pas quelque chose qui l’avait intéressé tout de suite… En fait, ça ne l’avait jamais tant intéressé que ça, sinon c’est sûr qu’il pouvait avoir toutes les filles ou même tous les mecs qu’il voulait. Le problème c’était pour les faire rester quoi. Il voulait un truc sérieux. Quelqu’un avec qui il se sentirait à l’aise tout le temps et avec qui il partagerait l’affection logée trop longtemps dans son cœur…un Yuiga humain quoi.

« … Mmh… 13 ans c’est vraiment trop jeune, ça ferait vraiment pédophile. Mais bon s’il a 18 ou 20 ans… ce n’est pas grave j’imagine. »

Il jeta un œil aux notes d’Erika, amusé, puis eut un petit sourire imperceptible en entendant Nao et ses allusions. Elle avait décidément trop bu et se lâchait, mais ce n’était pas une mauvaise chose, elle n’était pas gênée par sa présence au moins... Peut-être parce que justement, ce n’était pas une fan. Il n’y répondit pas, laissant Erika rire pour retourner à la cuisine et revenir quelques minutes plus tard avec les menus de divers restaurants qui livraient à domicile. Nao avait décidé d’un coup, surexcitée à l’idée de manger italien. Okay ils mangeraient donc italien. Ça ne le dérangeait pas, il aimait beaucoup ce restaurant, par contre il n’avait jamais essayé leurs pâtes aux asperges… C’était l’occasion. Décidément, beaucoup de première fois dans cette journée.
Il se retourna vers Erika à son sous entendu, mais bon là non plus il ne s’en offusqua pas. Il commençait à les connaître et vu la conversation qu’ils avaient eux juste à l’instant, ce n’était pas étonnant. Il lui fit aussi un micro sourire et attrapa un téléphone portable sur le meuble télé. Il composa le numéro.

« Je vais tester la même chose que vous… J’aime bien ce restaurant, ils font des bons plats… »

Lorsque le livreur décrocha, il demanda trois menus avec les pâtes aux asperges, comme ça ils auraient aussi les boissons et les desserts… et si elles n’aimaient pas le sucré, il se ferait un plaisir de tous les manger. Ça serait livré dans vingt minutes. Il raccrocha et se rassit sur le canapé.

« Sensei, vous devriez arrêter le saké pour ce soir… Je vous sers autre chose en attendant la livraison ? »

"ça ferais vraiment pédophile" ? Erika ne releva pas à haute voix, mais elle trouvait décidément amusant de voir à quel point les paroles qu'on pouvait sortir sans y prendre garde pouvaient porter à confusion. Là par exemple, on aurait pu se dire "ce n'est pas qu'il n'est pas attiré par les enfants de 13 ans, c'est qu'il ne veut pas de soucis avec la police". Erika ne pensait pas que Kasuka ait ce genre de goût, mais elle s'imagina que ça devait être vraiment difficile de faire attention à tout ce qu'on dit et à tout ce que les autres pourraient supposer de nos paroles. Elle plaint les politiciens puis revint dans l'instant présent.

Nao avait raison, un homme viril était ce qu'elle imaginait le mieux avec Kasuka. Quoi que... Elle hésitait, elle avait dû mal à se faire une image mentale précise de ce qu'il lui faudrait. Erika en fût vraiment étonnée, ça lui arrivait rarement d'hésiter sur ce genre de chose. Elle aussi était déstabilisée par Kasuka en fin de compte ? Non ! Comme si quelqu'un qui n'a qu'une moitié de prise dans la réalité ne pouvait pas être déstabilisé par quoi que se soit... n'est-ce pas ?

En tout cas Kasuka n'avait de toute évidence rien contre les expériences de tout genre, vu qu'il se laissait lui aussi tenté par le plat excentrique qu'avait choisi Nao. Une fois qu'il revint après avoir commandé, Nao s'était tournée vers Erika. Cette dernière sourit à la mention de son célibat devant Kasuka, le pauvre les croyait ensemble et n'allait probablement rien comprendre ! Mais ce n'était pas Erika qui allait expliciter la situation, elle trouvait que c'était beaucoup plus drôle comme ça !

Un homme comme Ed hein ? Elle aimait beaucoup le personnage, mais il ne pourrait pas la suivre dans ses délires otakuesques... Elle-même avait dû l'admettre et probablement que c'était aussi ce que pensait son entourage : à l'heure actuelle, c'était vraiment avec Walker qu'elle avait l'air de pouvoir sortir. Ils étaient même tellement proche que s'en finissait par devenir effrayant. Ils n'y avaient que pour quelques détails où leurs goûts différaient, mais ça restait minoritaire... Ceci dit, bien qu'un monde fou devait les considérer comme étant en couple, Erika pensait plutôt qu'ils étaient un peu comme 2 faces d'une même pièce... inséparables et complémentaires, sans jamais pouvoir ce rejoindre vraiment. Elle se demandait pourquoi elle voyait les choses de cette manière et soupira... Quelqu'un d'autre hein ? Elle ne voyait pas trop... En tout cas, elle ne voyait pas l'intérêt de laisser juste transparaître son hésitation.

« Nao-chan... Je savais que tu étais intéressé par Dotachin mais... tu m'as vraiment utilisée pour l'approcher c'est ça ?! [fait semblant d'avoir les larmes aux yeux] Vraiment ! Tu me déçois ! Tu veux que j'oublis le chagrin de notre rupture en me jetant dans les bras d'un homme ? Quelle cruauté ! »

Erika croisa les doigts pour que Nao ne soit pas encore trop soul, histoire qu'elle la suivent un peu dans son délire. Il y avait de quoi faire marcher Kasuka sans problème, ça pouvait être marrant.

Pas saoule ? Kasuka avait peu d’expérience à la matière, c’était dur pour lui de faire la différence… Mais bon, il n’aurait pas voulu que son professeur lui fasse un coma éthylique dans son salon. Il se trouverait bien embêté, pour la simple et bonne raison qu’il ne s’était jamais occupé de quelqu’un de bourré. Etant donné qu’il n’était pas le genre à fréquenter le monde du show-business, il avait réussi à éviter les substances illicites et les fêtes trop arrosées. En fait, il n’était pas vraiment contre ce genre de soirée, peut-être un jour il irait. Il se souvenait qu’un jour son manager lui avait demandé pourquoi il ne sortait jamais dans les clubs… Il n’avait jamais essayé, il ne pouvait pas dire qu’il n’aimait pas ça sans avoir essayé, mais il n’avait jamais eu l’occasion d’y aller non plus. Peut-être que s’il avait plus d’amis dans son milieu, il y serait entraîné. Mais il faudrait déjà qu’il se fasse des amis, et ça c’était pas gagné. Tout le monde n’était pas aussi curieux à son sujet qu’Erika et Nao, et lui n’allait pas vers les autres tout seul. Trop effacé, trop silencieux, légèrement asocial.

Il se leva pour aller donc lui chercher du thé, mais il lui laisserait la bouteille, au cas où… Parce qu’il n’avait pas le cœur, et surtout ce n’était pas sa place, de lui enlever l’alcool de la bouche. Il mit sa bouilloire en route et prépara les feuilles, choisissant un thé vert Sencha d’excellente qualité. Puis attendit patiemment que la bouilloire face son boulot, appuyé contre le bar qui le séparait du salon, il écoutait toujours la discutions des deux jeunes femmes. D’ailleurs…Elle devenait beaucoup moins claire d’un coup. Célibataire ? Elles n’étaient pas en couple à l’instant même ? Bizarre. Peut-être qu’elles avaient marché dans son délire, lui confirmant pour le perdre un peu plus ? Rah… pourtant elles avaient bien le comportement de deux jeunes femmes en couple… Bon à part que Nao fantasmait sur d’autres hommes mais bon… Dotachin ? Parlait-elle de Kadota Kyohei ? Erika-san semblait assez proche de l’entourage de son frère en tout cas. De ses amis comme de ses ennemis. En plus elle jouait le jeu… L’histoire de la rupture et tout ça… c’était quoi ce délire encore ?

Elles devaient jouer la comédie, autant entre elles qu’avec lui, il eut un petit rire intérieur, se demandant s’il n’avait pas été un peu indiscret en lui demandant ça. En tout cas c’était une belle improvisation… et si c’était vrai bah… c’était dommage, elles formaient un beau couple tout de même. La sonnerie de la bouilloire le tira de ses pensées et il servit trois tasses puis les apporta à la table du salon sur un petit plateau.

« … Je viens d’assister à ma première rupture en direct… ? »

Cette fois ce fut la sonnerie de l’interphone… les plats étaient là on dirait. Il se leva pour aller décrocher le téléphone et appuyer sur le bouton pour déverrouiller la porte puis ouvrit la porte, préparant un chèque avec le montant de la commande. C’était le livreur habituel. Il rougissait toujours en voyant Yuuhei, mais il était plutôt discret, surtout que l’acteur lui faisait des autographes de temps en temps pour ses proches, il n’avait donc aucun problème à créer. Yuuhei échangea le sac de nourriture contre le chèque et souhaita une bonne soirée au livreur, puis revint vers les filles, posant le butin sur la table et fit la distribution.

« Bon appétit ! »

[HS : désolée d'être autant en retard, je pensais répondre dès que je récupérais internet mais entre des problèmes d'ordi, des trucs à régler et tout simplement l'oubli, je ne rép que maintenant, sorryyyyy T_T]

S'il y avait bien quelque chose qu'Erika adorait chez Nao, c'était bien cette capacité qu'elle avait d'avoir une idée farfelue et de l'appliquer dans la seconde, sans trop réfléchir. Prenons un exemple, est-ce qu'une personne normale se mettrait brutalement à courir après un livreur simplement parce que celui-ci avait un peu rougit ? Erika en déduisait donc que les personnes normales étaient bien ennuyeuses alors qu'elle se faisait traîner par une Nao plus si timide que ça dans ce genre de circonstance.

Autant Erika n'avait rien dit lorsque Nao essayait d'expliquer leur relation, trouvant plus intéressant de la voir chercher ce qu'elle pouvait bien dire sans trop savoir si sa comparse fujoshi suivrait le délire, autant là elle avait délier sa langue face au livreur. Elle était particulièrement intéressée par la tournure que prenait les évènements sur un simple coup de tête. Typiquement le genre de choses qui lui faisait trouvé la réalité pas si ennuyeuse qu'elle pouvait parfois paraître à certains. Après tout, elle pensait sincèrement qu'il suffisait d'ajouter un grain de folie.

Après avoir poussé le livreur à donner son numéro, elles étaient remontées et Nao semblait toute fière de brandir le bout de papier devant Kasuka. Le pauvre s'était fait embarquer dans cette histoire avec une vitesse record et sans que ça n'ai le moindre rapport avec les cours qu'il devait prendre tranquillement avec Nao à la base. Erika espérait que ça l'amusait autant qu'elle.

« Yû, ce n'est peut-être pas ton truc de faire ce genre de choses, non ? Appeler quelqu'un que tu ne connais pas pour le voir et éventuellement plus si tout se passe bien ? C'est assez osé. Mais je pense vraiment que tu devrais essayé, tu n'as rien à perdre de toute façon, non ? Enfin, si ça ne s'ébruite pas, parce que ça pourrait faire un scandale... Mais bon, suffit de faire attention, tu ne crois pas ? »

Erika pris son plat qu'elle regarda quelques secondes, méfiante. C'était quand même un drôle de mélange. Mais bon, la vie est faite de nombreuses nouvelles expériences, non ? Elle attaqua donc voracement, bien qu'un peu surprise de trouver ça pas mal au final. Après quelques bouchées, Erika se tourna vers Nao. Elle se demandait toujours jusqu'à quel point la jeune femme était sérieuse quand elle parlait d'amour. C'était juste un délire pur et simple ?

« Dis Nao-chan, tu crois que Dotachin réagirait comment si on lui sortait un truc comme "Au fait, on sort ensemble" par exemple ? Ça pourrait être marrant non ? Et puis on pourrait voir si ça le déçoit et donc s'il avait des vues sur toi. Qu'est-ce que tu en penses ? »

Non, décidément, elle n'osait pas poser la question qui la préoccupait réellement...

Kasuka cligna des yeux, essayant de comprendre la relation qui unissait les deux filles. Elles s’aimaient d’amour mais n’étaient tout de même pas en couple parce qu’Erika était hétéro ? Relation platonique mais adorable en tout cas. Peut-être devaient-elles se considérer comme des meilleures amies, avec une relation plus proche que celle de deux sœurs que celle d’un couple. Okay donc tout à l’heure elles le faisaient bien marcher, à rentrer dans son jeu sans lever les ambiguïtés.

« …ça doit être sympa... votre relation. »

Puis alors qu’il allait boire une gorgée de son thé : la sonnerie retentit. Il répéta une scène dont il avait l’habitude. Il savait un peu cuisiner, mais cuisiner tout seul et pour soi, cela n’avait pas grand intérêt à ses yeux, alors il commandait des plats tout faits, ou s’achetait des bentos sur le chemin du retour quand il rentrait du travail ou d’une de ses nombreuses activités. Il avait remarqué aussi la rougeur sur les joues du vendeur, mais il était plutôt habitué à le voir comme ça, et n’avait jamais pensé qu’il pouvait être responsable de ces rougeurs là de cette façon là. C’était plutôt du à de la gêne de se retrouver devant quelqu’un de connu non ? Il resta sans réaction alors que les deux filles courraient après le livreur, mais quand il comprit pourquoi, il fit un petit sourire. Elles ne devaient jamais s’ennuyer ces deux là.

En voyant leurs sourires alors qu’elles revenaient, présentant fièrement leur bout de papier, il comprit qu’elles étaient parvenues à leurs fins. Comment ? Il était vraiment gay ce livreur ? Il était…intéressé ? Il prit le bout de papier et regarda les chiffres comme s’ils renfermaient un code caché.

« Merci les filles… »

Houla. Ça devenait beaucoup plus réel tout d’un coup cette idée de rencontrer un garçon. Il y avait du concret, des numéros tracés avec de l’encre sur du papier ne faisaient pas une relation, bien sûr, mais plus il regardait ce bout de papier plus il sentait la concrétisation de leur délire. Okay. Maintenant la balle était dans son camp. Aura-t-il le courage d’appeler ? Et qu’est ce qu’il proposerait au serveur, un dîner en tête à tête puis une soirée ciné ? Est-ce que les gays sortaient comme des couples hétéros… ? Il se rendit compte à quel point il était… nul pour tout ça. Et si le courant ne passait pas… pourrait-il encore commander ses pâtes carbonara dans ce restaurant ?

« J’imagine le scandale ‘Yuuhei Hanejima tombe amoureux du garçon qui lui livre les pates’ ça semble un peu… Pretty Women version Yaoi. Mais ça serait drôle. Je… j’essaierais. Il est mignon. Mais... je n’ai aucune idée de quoi lui proposer si je l’appelle. Il a quel âge à votre avis ? Il est étudiant peut-être…»

C’est là qu’on voit qu’une rencontre à l’aveuglette c’était délicat. Un truc simple, histoire de ne pas lui faire sentir la différence de moyen. De toutes façons l’ambiance 5 étoiles ça le branchait pas trop, ça lui rappelait les cocktails du boulot qu’il cherchait souvent à éviter. Mais pas un bar, s’ils allaient dans un bar et que Yuuhei commandait un diabolo fraise au lieu d’une Margarita, cela pourrait être mal interprété.

Il rangea le petit papier dans la poche de son jean, s’installa à son tour sur son sofa et prit sa boite de pates pour commencer à attaquer, voyant que ses invitées faisaient de même. C’était…étrange comme goût, mais pas mauvais. Yuiga réclamait à nouveau de l’attention, visiblement lui aussi voulait goûter au plat et mettait ses pattes sur le bras de Yuuhei pour l’empêcher de manger. Il écoutait les deux filles tout en regardant le chaton.

« C’est mauvais pour toi Yuiga, il n’y a même pas de viande, ça ne devrait pas t’intéresser… »

Mais il n’avait pas le cœur de repousser l’animal qui aurait décidément pu avoir le rôle du Chat Potté dans une version live de Shrek. Mais il tenta de faire abstraction et reporta son attention sur les deux jeunes filles.

« …Vous pensez que « Dotachin » n’a pas des doutes pour vous déjà ? Vous agissez plutôt de façon ambigüe l’une envers l’autre... »