Nao arriva au Parc vers 17h. Elle regarda autour de la fontaine afin d'y trouver une place, un banc était libre, elle s'empressa d'y aller, et d'y poser ses fesses. Elle étira ses bras en poussant un petit son aigu. Cela faisait maintenant deux jours qu'elle n'avait pas mis son petit nez dehors, à bosser non stop sur une traduction. L'histoire trainait encore dans sa tête. Une pauvre histoire d'amour entre une louve-garou et un vampire, le genre d'histoire qu'elle trouve complètement ridicule. Mais bon, ceci la faisait vivre convenablement, il fallait le reconnaître. Une fois fini, elle s'obligea à sortir, là voilà donc au Parc Minami.

Elle regarda son portable, pas de message. Elle soupira. Elle avait pourtant envoyé un message à Erika en sortant, espérant peut-être qu'elle la rejoindrait ici. Ils étaient peut-être occupés avec Dotachin et les autres. Dotachin... A peine elle pensa à lui que son image percutait déjà son esprit. Dotachin, quelle classe, il parlait peu mais lorsqu'il l'ouvrait, ce n'était pas pour dire n'importe quoi.

" Kyaaaa ! Il faut que je me calme ! " lança-t-elle sans faire attention.

Elle rougit net, des passants la regardaient bizarrement, la prenant peut-être pour une folle. Gênée, elle eu pour réflexe de sortir son ordinateur portable de son sac et l'installa sur ses cuisses. Elle l'ouvrit et vérifia ses mails. Elle regarda si une réponse de son employeur. Toujours rien, d'un côté, elle l'avait envoyé il y a même pas une heure. Bref, elle brancha ses écouteurs sur l'ordinateur, les plaça sur les oreilles et se mit un fond de musique, puis se laissa divaguer sur quelconques scans qu'elle avait trouvé sur le net.

Elle passa une heure ainsi, captivé par ce qu'elle lisait, alors que le soleil bougeait, que des gens passaient devant elle, s'asseyaient à côté mais elle n'eut pas une seule réaction. On pouvait par contre voir ce qu'elle ressentait à travers son visage, parfois elle riait, d'autres fois ses yeux traduisaient une certaine peur. Shizuo aurait pu passer par là et soulever le banc qu'elle ne l'aurait même pas remarqué. C'est comme ça qu'elle était lorsqu'elle se concentrait sur une chose. C'est pourquoi lorsque Poe réclame des câlins il lui plante souvent ses griffes dans la cuisse pour la tirer de son monde.

Erika sortait tout juste d'une séance de dédicace de Yamane Ayano. Elle rayonnait de joie, serrant contre elle son nouveau trésor, un croquis d'Ayano dans une pose lascive. Ça valait le coup de camper depuis plus de cinq heures devant le stand aménagé pour l'occasion. Du coup, elle n'était pas avec Walker et compagnie pour une fois. Aucun d'entre eux n'aurait voulu d'un dessin d'une mangaka de yaoi. Elle pensait aller faire un saut à animate avant de rentrer, le dernier tome de kuroshitsuji devait sortir le jour même. Elle se dit que Walker avait déjà du acheter les sorties du jour pendant qu'elle faisait la queue et alluma son portable pour l'appeler histoire de vérifier.

Ce ne fut qu'à ce moment-là qu'elle lu le sms de Nao. Elle se dit qu'elle ne devait plus être au parc maintenant et s'apprêta à écrire un sms d'excuse, ponctué de la description de sa nouvelle acquisition qui allait très vite être encadrée. Mais elle se ravisa au dernier moment, se disant qu'elle pouvait quand même passer par le parc qui était presque sur son chemin et voir si Nao y était toujours. Elle savait bien que la jeune femme pouvait perdre toute notion du temps lorsqu'elle allumait son ordinateur, ce qu'elle ne pouvait pas vraiment lui reprocher. Elle n'avait d'ailleurs pas perdue l'habitude de lire des scans alors qu'Erika lui avait souvent proposé de lui passé ses magasines de prépublications et ses mangas. Elle ne comprenait pas pourquoi Nao s'évertuait à jouer sa timide et à lire illégalement.

Erika traversa le parc en chantonnant l'opening d'ore no imouto ga konnani kawaii wake ga nai*, sautillant devant les regards curieux de certains promeneurs. Quand elle vit Nao, elle s’apprêta à faire de grand signes et à l'appeler de loin. Mais elle fut étonnée de la voir parler avec une Lycéenne. Surtout réservée comme elle est.

Erika sourit et s'écria tout de même :

"Nao-chaaaan ! Tu joues ta Kirino ?"

Et elle s'avança vers les filles.

"Orihara ?!!! Vraiment ? Comme Izaya Orihara ?"

Erika avait réagit de suite, quand elle entendit le nom, en trépignant sur place, un drôle de sourire aux lèvres. N'importe quelle personne normale se serait dit qu'une telle réaction pouvait pousser les autres à se poser des questions pouvant devenir embarrassantes. Mais ils auraient été à des années lumières de la vérité, à moins de connaître Erika bien entendu. Enfin, surtout son obsession pour le BL, particulièrement si ces divagations yaoistes pouvaient inclure un certain blond colérique et un brun sadique. Elle était bien la seule à imaginer ces éternels ennemis comme un couple. Mais peu importe ce que les autres pouvaient en penser, ça ne changeait strictement rien à ce que voyait Erika au travers de ses yeux déformateurs. Une scène de combat particulièrement violente entre les deux bagarreurs qui causent le plus de dégâts dans les environs prenait de suite une toute autre signification dans l'esprit détraqué de la fujoshi. Sur-interpréter tout et n'importe quoi comme on le désire n'est pas bien compliqué une fois la (mauvaise ?) habitude prise. Même si le Shizaya n'était pas le seul couple homo qu'elle avait en tête, c'était de loin son préféré.

Alors à l'entente du nom de famille de Kururi, le sang d'Erika n'avait fait qu'un tour et son esprit avait encore essayé d'imaginer toutes les possibilités que cela ouvrait. Car il fallait bien l'admettre, Izayan comme Shizu-chan n'étaient pas vraiment le genre de personnes auxquels on pouvait faire faire ce qu'on voulait. Où plutôt disons qu'ils n'étaient même pas le genre de personnes à pouvoir être approchées si facilement. Bien sûr, s'il s'agissait juste de leur parler, ce qui était en vérité plutôt simple. Shizuo était assez sociable quand les gens l'abordaient sans faire de vagues et Izaya avait un bureau ouvert aux demandes... diverses, après tout. Mais pouvoir avoir plus de détails sur leur "relation" (du moins ce qu'un esprit yaoiste pouvait interpréter comme), c'était une autre histoire. Étant tous deux dangereux, trèèès dangereux, les chercher signifiait ne pas vraiment tenir à la vie, même Erika en avait pleinement conscience. Et parler de l'autre... c'était la chose à ne pas faire si on ne voulait pas les énerver... C'était pourtant ce qu'Erika trouvait le plus romantique étrangement.

Cette Kururi savait-elle quelque chose au sujet d'Izaya et de Shizuo ? Probablement pensa Erika toute excitée. Elle pourrait peut-être aussi être une manière dérivée de parvenir à en savoir plus... Erika envisageait toutes sortes de possibilités, pas forcément très respectueuses de la volonté de la si mignonne jeune fille qui lui faisait face, quand la musique Hémisphère, l'opening de RahXephon, retentit. Elle sorti son portable et décrocha machinalement, sans même jeter un coup d'oeil au nom qui s'affichait sur l'écran. Elle se doutait de qui l'appelait.

"Yumacchi ! Tu devineras jamais qui je viens de renc... Quoi, maintenant ?! Même pas cinq minutes ? C'est pas vrai, moi aussi je dois être maudite par le roi des démons ! Ah vraiment ? Prépare les mangas alors, j'arrive de suite, juste le temps de récupérer deux ou trois petits "ingrédients" au passage ! À tout de suite !"

Erika raccrocha, à la fois déçue de s'en aller alors que les choses semblaient devenir intéressantes et excitée à l'idée de la séance de... "persuasion" qu'elle allait rejoindre. Même elle devait bien admettre que ses délires mentaux devaient passer après son rôle au sein des dollars. Pas qu'ils avaient moins d'importance ! Juste qu'ils étais un peu moins contraints par le temps.

Erika se retourna vers Nao et Kururi, s'étant un peu éloignée par réflexe lorsqu'elle parlait au téléphone, aussi rapide que fut le coup de fil.

"Désolée ! Je dois y aller ! On se revoit une prochaine fois ?"

Et sans même écouter la réponse, elle couru rejoindre son comparse.